Allianz et Groupama ne couvriront plus le risque émeutes en entreprise en Martinique et en Guadeloupe
Presque trois mois après le début de la mobilisation contre la vie chère en Martinique, les principaux assureurs sur place livrent un premier bilan du montant des sinistres et prennent des décisions fortes. En effet, de nombreuses entreprises ont été pillées et incendiées.
Selon l’Argus de l’Assurance, le coût des sinistres s’élève « entre 25 et 40 millions d’euros » pour Allianz France et « peut-être entre 60 et 100 millions d’euros pour le marché », évalue Pierre Vaysse, membre du comité exécutif d’Allianz France et directeur assurances de biens et de responsabilité. Alors que Generali, dont la filiale GFA Caraïbes avait été durement impactée, annonçait le 22 novembre 2024, la suspension de toute nouvelle souscription en risques d’entreprise aux Antilles, Allianz et Groupama prennent à leur tour des mesures.
Nous considérons que le risque émeutes n’est plus assurable dans ces territoires par l’assurance privé, déclare Pierre Vaysse, en annonçant à L’Argus de l’assurance : Nous avons a pris la décision d’exclure systématiquement le risque émeutes en entreprise sur l’ensemble de notre portefeuille.
Pour les entreprises déjà assurées chez Allianz France, cette évolution ne prendra effet qu’à échéance de leur contrat. Les autres risques dommages aux biens des entreprises resteront couverts.
Groupama, autre assureur présent sur place, a pris la même décision. Selon les premières estimations, « la sinistralité, à date, aux Antilles est de l’ordre de 10 millions d’euros avant réassurance », déclare le groupe mutualiste en précisant qu’il s’agit principalement d’incendies. « Nous allons exclure le risque émeutes de l’ensemble de nos contrats entreprises, considérant que le maintien de l’ordre n’est pas assuré et qu’il reste à la responsabilité de l’Etat », indique Groupama à L’Argus de l’assurance.
Des entrepreneurs inquiets
Inquiets, les entrepreneurs de la Martinique ont adressé une lettre au Premier ministre Michel Barnier réclamant une intervention de l’Etat pour rétablir une solution d’assurance viable, comme le relayaient nos collègues de Radio Caraïbes International. « Nous les comprenons tout à fait et nous partageons leurs inquiétudes, a réagi Pierre Vaysse. Si nous n’assurons plus le risque d’émeutes, c’est que nous considérons que ce risque a une intensité et une fréquence plus importante. Entre la Nouvelle Calédonie et la Martinique cela fait beaucoup en une année, sachant qu’il y a aussi eu des mouvements importants en métropole, notamment les émeutes urbaines de l’an dernier », rappelle-t-il.
La réassurance ne suit plus
Ces risques d’émeutes s’ajoutent aux risques climatiques, spécifiques aux Antilles et à La Réunion. « Les risques climatiques sont intenses et au même moment la caisse centrale de réassurance diminue la protection qu’elle nous assure aux Antilles. Cela représente beaucoup de contraintes pour les quelques assureurs présents dans les îles », déplore le directeur assurances de biens et de responsabilité d’Allianz France. Les principaux assureurs aux Antilles regrettent également que les réassureurs privés ne fournissent plus de couverture sur le risque émeutes. « La réassurance ne nous suit plus », indique ainsi Groupama.
Un choix au-delà de l’Outre-mer
Allianz France souhaite une évolution des pratiques. « Si nous voulons faire rentrer à nouveau ce risque dans le champ de l’assurance privée, ce qui nous paraît souhaitable, il faut un mécanisme de partage de risque comme celui que nous avons sur les catastrophes naturelles par exemple avec une garantie de l’Etat de payer l’ensemble des dommages indemnisés par l’assureur si le sinistre atteint un certain niveau, propose Pierre Vaysse. Et de conclure : c’est un choix de société qui n’engage pas que l’Outre-mer ».